Le
compost à domicile
Par
M. L. Serret, conseillère en environnement de la Commune
de Chaumont-Gistoux.
Pourquoi
composter?
Sur une année, chacun d'entre nous produit entre 125
et 210kg de matières organiques provenant de notre
cuisine et de notre jardin, soit près de 45% du poids
de notre poubelle!
Collectés en même temps que les ordures ménagères,
ces matières finissent dans les décharges au
lieu d'entrer d'un système de recyclage simple et peu
coûteux (en temps et en argent).
Autrefois
Certains
parmi nous se souviennent des gestes de leurs parents ou grands-parents.
La gestion des déchets ménagers était
réduite à sa plus simple expression : un trou
au fond du jardin! Bien que peu de matières non biodégradables
soient alors utilisées, les archéologues de
nos sociétés contemporaines peuvent y trouver
leur bonheur (bouteilles en verre, boîtes métalliques,
premières matières synthétiques,
).
Aujourd'hui
À
l'heure des collectes sélectives et des sacs payants,
nous pouvons adopter un comportement écologiquement
raisonnable, quelque soient nos quantités de matières
collectées et la nature de celles-ci.
Avant tout, à notre domicile, nous compostons nos déchets
de cuisine et de jardin. Et, le cas échéant,
nous déposons nos grandes quantités de déchets
verts au parc à conteneurs. Ces déchets de jardin
sont, eux aussi, compostés dans des infrastructures
adaptées. Le compostage réduit de 40% le volume
de nos ordures ménagères et constitue une source
d'engrais naturel pour notre jardin (potager, parterres de
fleurs, haies, verger,
).
Demain
Le Plan
wallon des Déchets (« Horizon 2010 ») prévoit
l'interdiction de la mise en décharge des déchets
organiques à partir de 2005. La Région wallonne
privilégiera la collecte de ces déchets en porte
à porte (à l'instar des collectes sélectives
actuelles).
Notre
recette du compost à domicile
Les
ingrédients
- Divers
déchets de cuisine : restes ou pelures de fruits,
de légumes et de salade, marc de café, sachets
de thé, coquilles d'uf, restes de repas (croûtes
de fromage, restes de pain,
),
- les
déchets de jardin : tontes de pelouse, feuilles,
fleurs fanées, tailles de haie coupées menu,
herbes sauvages, herbes sèches feuilles de
laurier, de chêne, de châtaignier, de noyer,
de houx, de lierre, de branches de conifères (en
quantité moindre);
- d 'autres
déchets organiques admis en quantité modérée
: fumier, litière des petits animaux domestiques
comme les poules, les lapins, les pigeons, les hamsters,
ainsi que celle du chat, à condition
qu'elle soit en matière végétale (la
litière classique est à base d'argile), cendres
de bois et de barbecue, sciures et copeaux de bois, restes
de vieux chiffons ou morceaux de carton déchiquetés,
papier gras, papier-journal qui a servi pour les légumes
(cependant un bac réservé aux épluchures
est plus approprié), rouleaux (carton) de papier
de cuisine et de toilette.
Sont totalement
déconseillés
Les plastiques,
le Nylon et autre produit synthétique, les textiles,
le sable, les cendres de charbon et de briquettes, des couches
de papier qui pourraient freiner la ventilation. Les sachets
d'aspirateurs en raison de la forte teneur en matière
synthétique qui peuvent entraver le compostage.
L'équilibre
du régime
Pour
obtenir un bon compost, il faut qu'il y ait un bon rapport
entre les matières sèches et les matières
humides, entre les matières grossières et les
matières fines, entre les matières riches en
azote et celles riches en carbone.
Matériaux
riches en azote :
déjections
animales, poudre de sang, déchets de cuisine, tonte
fraîche de pelouse, consoude, fumier décomposé,
foin de légumineuses.
Matériaux
riches en carbone :
paille
de froment, copeaux de bois, sciure, papier déchiqueté,
cartons non traités, papier essuie-tout, broyat sec,
feuilles sèches de bouleau.
En général, nos déchets de ménage
sont surtout constitués de matériaux riches
en azote (tonte de pelouse, déchets de cuisine,
).
Nous devrons donc amener du carbone sous forme de paille,
sciure, copeaux, cartons déchiquetés, branchage
broyé, feuilles sèches afin d'obtenir un compostage
équilibré.
En pratique, nous ferons en sorte de mélanger un volume
de déchets «azotés» à un
volume de matières «carbonées» suffisamment
humidifiées (Attention : la sciure sera mise en moindre
quantité vu sa grande finesse).
L'amorçage
Pour
édifier le tas, choisissons un endroit ombragé
et protégé des vents dominants. Ameublissons
le sol afin de permettre un bon échange entre la terre
et le compost, et donc avec tous les organismes vivants qui
vont « travailler » nos déchets.
Nous couvrons le fond d'une couche de déchets plus
grossiers comme de fines branches, de la paille, des fleurs,
ce qui favorise la bonne aération du tas.
Pour activer le compost, nous pouvons ajouter, en fine couche,
sur les déchets de cuisine, des résidus du compost
précédent; ou encore utiliser l'ortie ou la
consoude que nous incorporons régulièrement
dans le tas (telles quelles ou après macération
dans de l'eau). Les activateurs du commerce ne sont pas nécessaires.
Le sommet du tas peut être couvert afin d'éviter
que la pluie ne le détrempe. Une fine couche de paille,
d'herbes séchées, un sac de jute,
protège
ainsi le compost de l'humidité excédentaire
et des animaux (insectes et autres), tout en permettant à
l'air de passer modérément.
L'astuce du compostage est de trouver le rapport idéal
entre l'humidité et l'aération de la matière
à composter. Trop d'humidité élimine
l'air entre les particules ce qui enclenche un processus de
pourriture avec production de mauvaises odeurs. Trop d'air
assèche le tas qui ne se décompose plus ou pas
suffisamment.
Les
trucs du bon composteur :
- Mélangeons
la matière sèche avec la matière humide;
Ajoutons modérément la matière très
humide ou très sèche en une fois;
- humidifions
les matières trop sèches, évitons que
les matières ne soient trop détrempées
: quand nous pressons, à la main, une poignée
des matériaux à composter, nous devons sentir
l'humidité sans qu'il n'y ait de l'eau qui s'écoule;
- affinons
les déchets comme les trognons de choux et les tontes
de haies, soit avec une petite hache, un broyeur ou la tondeuse
à gazon (étalons les déchets à
broyer, passons sur une demi-largeur et pas trop bas, évitons
les branchettes de plus d'un centimètre de diamètre
(prudence), avant de les introduire dans le tas. Les micro-organismes
chargés de décomposer la matière apprécieront
notre effort;
- alternons
nos déchets (un peu de tout, pas trop d'un seul);
- n'écrasons
pas nos déchets : une matière non compactée
favorise la circulation de l'air;
- faisons
attention aux grandes quantités de :
- tonte de gazon en été (elles pourront être
utilisées avantageusement pour couvrir le jardin
en fine couche entre les lignes de légumes, ce qui
maintient l'humidité (économie d'arrosages)
et qui garde le terrain désherbé). De toute
façon, préfanons les tontes avant de les introduire
dans le compost;
- feuilles en automne (elles peuvent, suivant la variété,
servir de couverture pour le jardin en automne-hiver et
conserver la chaleur de la terre);
- déchets de jardins saisonniers (fleurs, légumes);
Si nos épluchures d'agrumes sont traitées
au diphényle (conservateur), elles risquent de perturber
le compostage en tuant, autour d'elles, la vie microbienne;
certains gazons traités à l'herbicide sélectif
aussi.
Avec
ou sans compostière
Le tas de compost peut prendre diverses formes, en fonction
des quantités à composter, de l'espace disponible
et de nos goûts personnels. Les conseils cités
plus haut sont valables quelque soit la dimension de notre
compost.
Si nous disposons d'espace et de grandes quantités
de déchets, préférons le tas allongé,
à même le sol et sans cloison. Veillons à
ne pas dépasser la hauteur d'un mètre pour ne
pas étouffer le tas sous le poids des matières.
Pour les jardins moyens, des caisses en bois sont adéquates.
Elles peuvent être achetées en kit ou créées
à base de palettes et de blocs en béton. Le
bois est traité à l'huile de lin (une fois par
an) afin de ne pas détruire les micro-organismes.
Pour les petits jardins, le fût est à la fois
esthétique et efficace. Il faut, particulièrement,
veiller à la bonne aération du tas en introduisant,
régulièrement, une fourche étroite à
l'intérieur du conteneur (comme une cuillère
dans une marmite!).
Laissons
mijoter, puis mélangeons
Au début,
nous observons une augmentation de la température dans
le tas, c'est la phase de purification. La température
se stabilise ensuite à 45°C environ. Apparaissent
des champignons qui fixent l'azote. Suivent les lombrics,
environ six semaines plus tard. Ils vont poursuivre le travail
de décomposition et de reconstruction des matières.
Nous obtenons un compost mi-mûr ou jeune en six à
huit semaines; un compost mûr en six à huit mois.
Le retournement est nécessaire afin de (re)mélanger,
d'une manière homogène, les matières
et de vérifier la bonne évolution du compost.
Tout ce qui est à l'intérieur du tas va à
l'extérieur. Tout ce qui est au-dessus va en-dessous.
Le retournement s'effectue après, plus ou moins, six
semaines pour les tas allongés et toutes les semaines,
dans le silo ou le fût à composter, avec l'outil
adapté ou une fourche.
Passons à table!
Le compost
jeune, où nous retrouvons encore pas mal de matières
grossières, est épandu idéalement en
fin de saison, en automne, afin de couvrir le sol. Les organismes
présents dans ce sol peuvent continuer l'action de
compostage. Il est laissé en surface et couvert avec
une couche de paille, feuilles, tontes. Le compost mûr,
bien défait, tamisé, à l'aspect et à
l'odeur de la terre des bois, peut être incorporé,
par griffage, dans les premiers centimètres de la couche
fertile du jardin et ce, en toute saison.
Les
portions par convive
En fonction
des besoins du sol et des besoins des cultures : les faibles
consommatrices peuvent consommer jusqu'à 50kg/100m2;
les moyennes consommatrices, de 50 à 300kg/100m2; les
grandes consommatrices nécessitent plus de 300kg/100m2.
Quelques
idées
À la
maison
Gardons un petit seau dans la cuisine, près de l'évier
ou du plan de travail. Nous pouvons y ajouter un couvercle,
pour garder un conteneur « propre ». La «poubelle
de table» peut faire l'affaire à condition de
laisser une partie des déchets de légumes sur
le potager.
Si nous devons aménager ou restaurer notre cuisine,
pensons à réserver des espaces intégrés
pour les collectes sélectives. Exigeons ceux-ci auprès
du cuisiniste, si nous faisons appel à un professionnel.
À
l'école
Si nos
enfants ne peuvent aménager une zone potagère,
les plantations environnant leur école peuvent aussi
profiter du compostage des restes de leurs «10 heures»,
dîner (repas complet ou tartines) et goûter éventuel.
À l'aspect écologique du projet s'ajoute la
face pédagogique.
Au
travail
Nous
ne bénéficions pas tous d'un environnement vert
et spacieux. Rien ne nous empêche pourtant de composter
les restes de nos repas pris sur notre lieu de travail : la
vermicompostière convient pour les cuisines n'ayant
pas d'accès à un jardin (bureaux, appartements,
).Ce conteneur ne nécessite pas un contact direct
avec la terre. Les micro-organismes, provenant d'un compost
existant, se satisfont de la nourriture que nous leur apportons.
Nos plantes d'intérieur en font leur profit.
Nos
références
- «Le
compostage» par G. de Halleux, Agrobiologie - Info-Conseils,
carab a.s.b.l., Dossier technique n°9/87.
- «Le
point sur le compostage en Belgique» par M-C. Salade,
Mémoire présenté en vue de l'obtention
du titre d'ingénieur industriel, Institut Supérieur
Industriel, Huy - Gembloux - Verviers, 1993/1994.
- «Le
compostage individuel» du Ministère de la Région
wallonne (D.R.G.N.E.) - 1999.
- Notes
de stages de formation (Cours de «jardinage biologique»
et d'«écologie au quotidien» par l'a.s.b.l.
«Bon
jour Sourire») (1994), de conférences
de Vincent Gobbe (Comité Jean Pain), de Roger Bruyeer
(Nature & Progrès), de Joseph Orszagh (1999)
.
M.
L. Serret, 2002
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