Pourquoi
la botanique?
Introduction
La
systématique
La taxonomie
L'espèce
Le genre
La famille
L'utilité des
herbiers
Introduction
S'il
ne faut pas oublier que différencier et identifier
les éléments de leur environnement étaient
déjà avant l'homme une question de première
nécessité pour les autres organismes vivants,
essayer de comprendre, nommer, classer tout ce qui l'entoure
sont deux démarches que l'homme a développées
à un degré élevé.
"...Un
des besoins élémentaires de l'homme est de connaître
les différentes choses qui composent son environnement.
Même les peuples primitifs ont des noms pour désigner
les différentes sortes doiseaux, de poissons, de fleurs
ou d'arbres, et ils reconnaissent exactement les mêmes
"espèces" que les taxinomistes modernes."
Stephen
Jay Gould, 1979
"La
possibilité de nommer ainsi n'existe que parce
que la diversité de la nature n'est pas continue,
mais consiste en entités séparées
les unes des autres par des discontinuités.
On trouve dans la nature non seulement des individus,
mais des "espèces",
c'est à dire des groupes d'individus qui partagent
certaines caractéristiques communes..."
Ernst
Mayr, Histoire de la biologie, Fayard, 1989
(n. b. voir plus bas les réserves
à propos de ce concept appliqué aux Roses).
Deux
autres réflexions de scientifiques du XIXe siècle
méritent notre attention.
"Les
taxinomies {ou systèmes de classification} doivent
servir de base pour inciter à entreprendre des recherches
scientifiques et n'ont pas pour fonction première d'être
des systèmes de rangement destinés à faire
primer l'ordre." (Étienne
Geoffroy Saint Hilaire (1772-1844), professeur de zoologie
au Muséum d'histoire naturelle de Paris et créateur
de la ménagerie du Jardin des plantes).
Cela
sous-entend d'une certaine manière que chaque
modification apportée par les scientifiques dans
les systèmes de classification a avant tout comme
but d'affiner notre manière de percevoir, ou d'appréhender
le monde qui nous entoure. En principe donc, les motivations
des chercheurs n'ont pas grand chose à voir avec des
"fantaisies de savants" (même si on ne peut
jamais sous-évaluer le facteur humain et l'apport
de tournures d'esprit personnelles dans la recherche ;-)
"Toute
vraie classification est généalogique: la communauté
de descendance est le lien caché que les naturalistes
ont, sans en avoir conscience, toujours recherché." (Charles
Darwin (1809-1882), père de la théorie
de l'évolution).
L'homme
est un résultat de l'évolution, et
les scientifiques tentent de schématiser celle-ci
sous la forme d'une généalogie, afin de mieux
comprendre quelles sont les affinités entre les différents
éléments du monde vivant. Imaginer qu'un végétal
(la rose, par exemple) et un animal (l'homme) puissent avoir
dans un lointain passé une origine commune n'apporte-t-il
pas un petit élément de réponse à la
question de le place de l'homme dans la nature et de sa
relation avec celle-ci?
La
systématique
C'est
la science qui étudie la diversité et l'organisation
des êtres vivants (dans notre cas il s'agira de plantes).
La taxonomie
Considérée
en général comme une partie de la systématique,
c'est la branche de la biologie qui étudie les principes
et la pratique du classement des êtres vivants en catégories.
Les membres de ces catégories sont ce que l'on appelle
les "taxons" (d'où l'appellation de "taxonomie").
Comme tout classement, le classement taxonomique comporte
par la force des choses des "catégories de catégories",
donc divers niveaux ou "rangs".
L'espèce
Le rang
d'espèce est le rang taxonomique le plus présent sur ce
site parce qu'il est peut-être celui le plus susceptible
d'aider le néophyte à faire ses premiers pas dans la logique
de la biodiversité.
Il
semble aller de soi qu'il y a différentes "sortes"
de roses sauvages. Le "rosier des chiens" en est
une, le "rosier pimprenelle" en est une autre. Suivant
les botanistes spécialistes de la rose, il y aurait
au total dans le monde entre 200 et 300 "espèces"
de roses sauvages différentes. L'idée d'espèce
est très ancienne dans l'histoire de la classification
des êtres vivants. L'espèce est en général
considérée comme la catégorie de base
en botanique. Cela ne veut pas dire qu'elle se situe en dessous
de toutes les autres (au "rang" le plus bas), mais
que toutes les autres catégories sont définies
et décrites par rapport à elle: la catégorie
de "genre" désigne des groupes d'espèces,
et la catégorie de "sous-espèce" et
de "variété" désignent des
parties d'espèces.
Dans
la pratique, chaque espèce est une
entité très vaste, comprenant le plus souvent
un grand nombre de variations (sous-espèces, variétés,
formes, ...). Ces variation surviennent au sein de l'aire
générale dans laquelle on rencontre l'espèce,
mais cette aire peut aussi être divisée en populations
n'ayant plus de contacts entre elles depuis de nombreuses
générations. Ensuite, chaque espèce
comprend des myriades d'individus chacun issu d'une graine.
Comme chez l'être humain et la plupart des plantes
et animaux sauvages, la reproduction par voie sexuée
de chaque individu donne une descendance variée. Si
ce caractère
varié ne se repère pas nécessairement au premier coup d'oeil
dans une population de plantes sauvages, cela ne veut pas dire qu'au-delà des
apparences il n'y a pas une variation génétique importante dans
cette population.
n.
b. La rose pose le problème de l'espèce d'une manière particulière.
E.
Mayr, cité plus haut a proposé un concept biologique d'espèce
basé sur l'impossibilité des espèces
à se féconder l'une l'autre. Ce concept venu d'un zoologiste
est inadapté au genre Rosa puisque pratiquement toutes les
espèces
peuvent
s'y
croiser entre elles en donnant le plus souvent des résultats
fertiles. De plus il n'est pas rare que cela se produise
même dans la nature et certaines espèces ont probablement
une origine hybride ancienne (R. gallica, toutes les Caninae,
que Boulenger appelait phenhybrides, ...). Par ailleurs,
en ce qui concerne les espèces nord américaines par exemple,
il n'y a pas toujours de discontinuités entre elles mais
plutôt des "gradients", sorte de "dégradés" des caractères
de l'une en direction des caractères de l'autre. Cela signifie
que non seulement pour chaque espèce pratiquement, c'est
un mécanisme différent qui a causé et qui maintient pour
un temps la différence
que nous lui percevons par
rapport aux
autres, mais en plus chaque espèce de rose apporte sa propre
manière de voir le concept même d'espèce. Une sorte de
boîte de Pandore de biodiversité est donc ouverte par ce
beau genre à propos duquel les ignorants (crasses) persistent
à dire qu'"une rose est une rose, est une rose ..." !!!
Le genre
L'ensemble
des roses constitue un "genre"; l'ensemble des ronces
en est un autre, de même que l'ensemble des fraisiers,
l'ensemble des pommiers, ... Comme l'espèce, le genre
est une idée (un concept) très ancienne dans
la classification des êtres vivants.
Le genre regroupe des espèces ayant un certain nombre
de caractéristiques en commun qui les distinguent nettement
(on dit qu'il y a "discontinuité") des espèces
réunies dans d'autres genres. Ces ressemblances expriment
le fait que ces espèces descendent d'un ancêtre
commun.
Toutefois, définir l'ensemble des caractères
qui permettent de regrouper les espèces de cette manière
et non d'une autre n'est pas toujours facile. Afin que ce
groupe soit considéré comme "naturel",
il faut que ces caractères communs soient suffisamment
nombreux et qu'ils aient une signification importante du point
de vue de l'évolution.
La
famille et en deçà
L'idée
de "famille" est plus récente que les deux
autres. On l'attribue souvent au médecin botaniste
français Pierre Magnol (1638-1715), directeur du Jardin
des plantes de Montpellier à qui Linné dédié un
genre d'arbre bien connu (le Magnolia).
La famille comprend un ou plusieurs genres. Par exemple,
les différents genres évoqués plus haut
(roses, ronces, fraisiers, pommiers, ...) sont regroupés
dans la famille des rosacées, qui comprend de nombreux
autres genres.
Selon
le système de classification
de Cronquist, la famille des rosacées est inclue
dans l'"ordre"
des Rosales (qui comporte 24 familles au total), lui-même
inclus dans la "sous-classe" des Rosidées,
qui contient 18 "ordres", les Rosidées
faisant partie (avec 5 autres sous-classes) de la "classe"
des Dicotylédones (plantes présentant deux
cotylédons
à la germination). Les Dicotylédones sont l'un
des membres du "sous-embranchement" des Angiospermes
(plantes à graines "enfermées"),
faisant partie de l'"embranchement" des Phanérogames
(plantes à fleurs).
Le
principal système de classification actuel, en
ajustement permanent, fait appel à des critères
relevant autant de la morphologie que de la génétique,
de la biochimie, l'écologie etc. Il
resulte de la collaboration d'un groupe international
de chercheurs dont les résultats sont publiés
et mis à
jour très régulièrement sur l'Angiosperm
Phylogeny Website,
hébergé par le Missouri Botanical Garden.
Il ne diffère
pas sensiblement du système de Cronquist pour ce
qui concerne le placement
de la famille des Rosaceae, mais par contre
la surprise est venue il y a quelques années des
quelques familles qu'on en rapprochait, telles les Urticaceae
(famille
de l'ortie), les Cannabaceae (famille du houblon et du
chanvre), les Ulmaceae (famille de l'orme) et les Moraceae
(famille du figuier).
L'utilité des
herbiers
Il n'est
pas possible de décrire l'évolution des roses
cultivées sous la forme d'un arbre généalogique
à un seul tronc (ce n'est d'ailleurs pas notre but
ici) comme on tente souvent de le faire pour l'évolution
de l'ensemble des êtres vivants depuis leur origine.
Si les catégories actuelles de roses cultivées
sont multiples, leurs origines le sont tout autant. D'autre
part il est fréquent que des branches de l'arbre généalogique
des roses, ou même des ramifications à différents
degrés séparées pendant un certain temps
se rencontrent à nouveau pour donner naissance à
de nouvelles lignées. Cette particularité est
due au fait que les roses se croisent assez facilement entre
elles, non seulement quand elles poussent côte à
côte dans la nature, mais également lorsque,
provenant de régions très éloignées
l'une de l'autre elles se rencontrent dans un jardin.
Des
indices de l'évolution des roses cultivées nous ont
été donnés par les roses dites "anciennes",
objet ces dernières décennies d'un grand engouement
parmi les amateurs.
Certaines d'entre elles sont une étape intermédiaire
entre la première apparence des roses, c'est à
dire celle qu'elles avaient et ont toujours dans la nature
à l'état sauvage, et leur apparence actuelle
dans nos jardins.
D'autes sont plutôt des roses "à l'ancienne
mode", dont la forme découle à la fois
des possibilités qui s'offraient à l'époque
et des choix d'utilité et de mode du temps jadis. Certaines
roses anciennes représentent des lignées interrompues
depuis longtemps.
Pour
arriver à faire des roses ce qu'elles sont, l'homme
s'est toujours servi des possibilités qu'elles avaient
en elles. À l'origine, le simple fait de les transférer
dans les jardins leur a permis de développer, sous
le regard attentionné et la protection de l'homme certaines
de ces possibilités qui auraient été
éventuellement défavorables à leur survie
dans la nature. La même chose est vraie pour toutes
les plantes cultivées.
Pour
reconstituer l'histoire des roses depuis son origine dans
la nature, la première possibilité qui se présente
est de faire appel à ce qu'elles montrent d'elles-mêmes
au premier abord: leur morphologie (c'est à dire l'ensemble
des détails qui les caractérisent, leurs formes
et leurs dimensions, ...).
Les caractéristiques qui ressortent chez les roses
cultivées lors de cette première approche peuvent
être comparées à celles que l'on peut
observer sur les roses sauvages dans la nature. Mais comme
il n'est pas toujours pratique, ni possible même de
se rendre dans la nature pour y faire des comparaisons, les
herbiers jouent un rôle primordial. Conservés
dans les jardins botaniques (comme par exemple ici à
notre Jardin botanique national à Meise), ils constituent
une sorte de "bibliothèque" qui permet de
prendre conscience de la morphologie des différentes
sortes de plantes (en l'occurence des roses) dans ses moindres
détails (jusqu'aux microscopiques), de les comparer
entre elles, etc...
Grâce aux herbiers, la recherche botanique peut aussi
être menée en toutes saisons. Mais un autre avantage
est que les différentes institutions et jardins botaniques
qui possèdent des herbiers se prêtent et s'échangent
entre eux ce matériel, ce qui permet d'étudier
et de comparer des plantes qui proviennent d'autres parties
du monde sans avoir à se déplacer.
La branche
de la botanique qui s'occupe de nommer et de décrire
les différentes parties de la plante est l'"organographie".
Elle utilise un vocabulaire très riche qui, dans l'idéal
devrait permettre de caractériser et d'identifier les
différentes sortes de plantes de manière précise
sans avoir à les comparer à des illustrations
telles que photos ou dessins par exemple.
ivan
louette, dernière mise à jour le 23 février 2005
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