De
l'utilité des grandes
collections de roses
Par
Raphaela Langenberg, Présidente de l'association Lost
Beauties. Texte publié initialement en anglais
sur le RareRoses-Forum le
19/02/2004.
Introduction
Les petites collections publiques ou privées
peuvent-elles remplacer les plus grandes ?
Quelques solutions possibles
Conclusion
Introduction
En
raison de conditions économiques médiocres,
dans de nombreux pays l'autorité publique réduit
ses investissements dans le domaine culturel. Par ailleurs,
récolter des fonds pour des organismes ou des associations
d'intérêt public devient de plus en plus difficile
en période de pénurie d'emploi.
L'entretien de grandes collections de roses peut s'avérer très
coûteux. Beaucoup d'entre elles nécessitent de l'espace et des
soins appropriés, amendements et arrosages entre autres choses. Certaines
peuvent mal tolérer les conditions de l'une ou l'autre roseraie, en
particulier parce qu'elles ont été hybridées et sélectionnées
pour d'autres climats. Résultat, un grand nombre d'entre elles semblent
malheureuses ou soufreteuses en culture.
De plus bon nombre de visiteurs sont plus impressionnés par l'effet
de masse des plantations que par chaque variété de rose en elle-même.
Cela
pourrait avoir pour conséquence que les responsables
de grandes roseraies en éliminent certaines variétés
anciennes pour les remplacer par de nouvelles obtentions
nécessitant moins de soins.
Peut-être certaines firmes spécialisées dans la production à grande échelle
de variétés nouvellement créées pourraient-elles
trouver cette idée intéressante et accroîtraient-elles
volontiers leur contribution dans les roseraies s'il s'y trouvait plus d'espace
pour leurs nouvelles introductions.
Très
bien me direz-vous? Non ! Trop de variétés
déjà ont été perdues. Chacune
d'entre elles est un organisme vivant d'une valeur culturelle
et historique unique. Les conventions internationales concernant
la biodiversité comprennent un paragraphe qui inclut
les variétés de roses existantes.
Personne ne connaît l'ensemble des roses, et personne ne devrait avoir
le droit de juger de la valeur d'une variété à partir
de l'exemple d'un spécimen vu dans une roseraie où il croît
dans de mauvaises conditions et sous un climat inadéquat.
Bien des amoureux des roses ont fait l'expérience d'un plant d'une variété qui,
chétif dans une roseraie de collection s'est mis à prospérer
(même sans traitements phyto) une fois planté dans un sol plus
riche.
Les modes et les goûts du public évoluent au cours des temps :
Dans quel état de misère serions-nous par exemple si toutes les
anciennes roses de jardin s'étaient éteintes lors de l'avènement
des roses thé ou hybrides de thé.
Nous ne pouvons pas prévoir quelles roses seront les préférées
de nos descendants, ni lesquelles d'entre elles joueront un rôle important
dans leurs hybridations. Certaines ont survécu depuis l'époque
de nos aïeux et nous avons le devoir de les sauver pour les générations
futures.
J'ai connu au moins un cas où une importante pépinière
a dû se résoudre à mendier auprès d'une autre plus
petite des greffons d'une variété qu'elle avait retiré de
son catalogue quelques années auparavant et que cette dernière
avait heureusement conservé. Sans cela la grosse pépinière
n'eût plus pu l'utiliser pour de nouveaux croisements. Cela s'est probablement
produit plus d'une fois. Bien que je n'aime pas trop les couleurs criardes,
je défendrais bec et ongles n'importe quel floribunda jaune fluo strié de
rose si celui-ci se révélait en danger d'extinction.
Les
petites collections publiques ou privées
peuvent-elles
remplacer les plus grandes ?
Les collections
privées ou les petites collections publiques principalement
spécialisées dans les roses régionales
ou les roses d'un obtenteur particulier sont d'une grande
importance. Les variétés qui sont seulement
représentées par quelques spécimens
dans quelques roseraies, ou même par un spécimen
isolé étant en grave danger, il serait nécessaire
de les multiplier dans autant de collections et autant
de pays que possible. Les petites collections publiques
ou privées pouvant être des hébergements
supplémentaires pour elles.
Un réseau de collectionneurs privés échangeant connaissances
et matériel vivant et attirant l'attention du public vers les roses
rares pourrait jouer un rôle important pour la préservation des
variétés. Mais il ne pourrait remplacer les grandes roseraies.
Les grandes collections présentant un nombre important de variétés
offrent par contre une opportunité unique pour une recherche approfondie
impliquant un grand nombre de roses de différents groupes.
Elles sont des plus importantes comme lieu de rencontres et de discussions
entre experts.
Certaines circonstances malheureuses peuvent entraîner un mauvais étiquetage
des roses. Cela peut se produire dans les pépinières, les jardin
privés et les roseraies et collections. Seuls les lieux visités
par un maximum de connaisseurs donnent une chance à ces variétés
de retrouver leur indentité.
Quelques
solutions possibles
Les roseraies
de collections ont besoin d'un soutien plus appuyé.
Peut-être le parrainage des variétés
pourrait-il représenter une solution : Les entreprises
privées et les associations pourraient parrainer
des groupes ou des parterres de roses déterminés,
les particuliers pourraient parrainer une variété et
les villes et communes prendre la responsabilité des
roses qui portent leur nom, ou éventuellement leur
groupe dans sa totalité, voire le parterre dans
lequel elles poussent. Des groupes de volontaires pourraient
contribuer à l'entretien de manière à en
diminuer les coûts.
Les agriculteurs pourraient fournir du fumier.
Les roseraies de collection pourraient intensifier la multiplication des raretés
dans leurs pépinières et les vendre à des prix plus élevés
pour le public ou les mettre aux enchères lors d'occasion particulières
telles que la visite de personnalités connues.
De nombreux amoureux des roses seraient heureux d'avoir l'opportunité de
se procurer des raretés et de contribuer par la même occasion à leur
entretien et leur conservation.
Les techniques marchandes pourraient être une autre solution.
Enchères et évènements pourraient être entourés
de plus de publicité que ce n'est le cas actuellement, et par ailleurs
les investissements au bénéfice des roses devraient être
considérés comme prioritaires par rapport aux investissements
en infrastructure et représentation tels que pavillons, bancs et statues
par exemple. Les roses d'abord !
Une information plus abondante et plus accessible au sujet de chaque variété,
obtenteur, groupe botanique et catégorie horticole de roses pourrait
renforcer l'intérêt du public et le responsabiliser plus, ce qui
pourrait l'inciter à contribuer davantage.
Mais
il s'agit là seulement de quelques idées
jetées spontanément sur le papier. Et je
suis certaine que les amoureux des roses pourraient en émettre
bien d'autres.
Conclusion
Les grandes
collections de roses anciennes, toutes variétés
confondues ont une valeur historique, botanique et génétique
immenses.
Chaque variété est un héritage culturel et a son importance
aussi bien aujourd'hui que pour les générations futures.
Les grandes collections ne doivent être ni fragmentées, ni "épurées",
ni partiellement détruites.
Aucune variété ne doit disparaître, intentionnellement
ou non.
Toutes les variétés existantes sont un héritage qui doit être
préservé dans sa totalité pour le futur.
Sélection rime toujours avec extinction ; les vrais amoureux des roses
veillent au grain et feront de leur mieux pour prévenir l'une et l'autre.
Traduction
Ivan Louette ; mis en ligne sur botarosa le 30 mars 2004
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